Côte d’Ivoire : La grève des fonctionnaires des 15, 16 et 17 octobre 2024 est-elle légale ?
C’est en principe demain mardi 15 octobre 2024 que doit débuter la grève de 72 h de certains syndicats de la Fonction publique issus des Ministères de l’Education nationale, des Affaire sociales, de la Femmes, familles et enfants, de la Santé et de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle. Cette grève prévue les 15, 16 et 17 octobre 2024 qui a vu les futurs grévistes déposés un préavis de grève au Ministère d’Etat, ministère de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration porte sur plusieurs revendications dont la principale est l’octroi d’une prime trimestrielle d’incitation.
Des voix s’élèvent pour dénoncer le caractère illégal de ce débrayage de 3 jours. Plusieurs arguments sont évoqués à cet effet. Il s’agit entre autre du non-respect de la procédure de grève dans les services publics telle que prescrite par la loi n° 92-571 du 11 septembre 1992 fixant les modalités de la grève.
Selon ces dénonciateurs aux termes des dispositions des articles 2 et 3 de ladite loi, le déclenchement de la grève est obligatoirement précédé d’une procédure de conciliation comprenant les trois phases successives que sont d’une part, la tentative de conciliation entre le service ou l’organisme employeur et les agents, en liaison avec les services compétents du Ministère en charge de la Fonction Publique, d’autre part d’une saisine du ministre technique intéressé et du ministre chargé de la Fonction Publique en vue d’une solution et enfin de saisine du chef du gouvernement en dernier ressort.
C’est donc en cas d’échec de la conciliation, que l’organisation syndicale concernée est tenue, si elle désire recourir à la grève, de déposer un préavis précisant les motifs, le lieu, la date et l’heure du début de la grève, simultanément au Ministère en charge de la Fonction Publique contre la remise d’un récépissé de dépôt et au Ministère technique ou à la Direction de l’établissement concerné, au moins six (06) jours ouvrables avant la date prévue pour le déclenchement de la grève. Aussi, il est précisé que le préavis ne fait pas obstacle à la négociation en vue du règlement du conflit.
Toujours donnant les raisons de l’illégalité de cette grève, il est noté que les initiateurs de la grève annoncée appartiennent aux centrales et faitières syndicales signataires de l’accord portant trêve sociale qui court de 2022 à 2027, signée le 08 aout 2022 qui consacre, désormais, le dialogue comme moyen de revendication pour toutes préoccupations nouvelles.
Ces dénonciateurs de la grève estiment que cette grève de 72H est inopportune dans la mesure où le dialogue social, entamé et consacré par le protocole d’accord et les textes internationaux, n’a jamais été rompu avec l’institution des comités sectoriels de dialogue social par décret suivi de leur mise en place dans tous les ministères ; l’existence du comité de dialogue social dans la Fonction publique ; l’installation du comité consultatif de la Fonction publique et les rencontres périodiques avec la ministre d’Etat Anne Ouloto, avec les 08 signataires de la trêve sociale.
Toujours pour démonter cette grève qu’ils supposent illégale, ils défendent mordicus que le gouvernement ivoirien a honoré ses engagements pris lors de la signature de la trêve sociale qui s’élèvent à plus de 1100 milliards sur la période 2022 à 2027 à hauteur de 99%.
Cela avec la promulgation de la loi 2023-892 du 23 novembre 2023 portant Statut général de la Fonction Publique (SGFP); l’opérationnalisation du Comité Consultatif de la Fonction Publique ; la finalisation et la mise en œuvre par le gouvernement ivoirien, de la réforme du système d’imposition des salaires consacrant la suppression de la Contribution Nationale (CN); l’instauration d’une prime exceptionnelle au profit des Fonctionnaires et Agents de l’Etat en activité et à ceux ayant fait valoir leurs droits à la retraite; la revalorisation de l’indemnité de transport des fonctionnaires et agents de l’Etat; la revalorisation des allocations familiales par enfant pour tous les fonctionnaires et Agents de l’État; l’extension du bénéfice de l’indemnité contributive au logement aux Fonctionnaires et Agents de l’État qui n’en bénéficiaient pas; la revalorisation de l’indemnité contributive au logement pour l’ensemble des Fonctionnaires et Agents de l’État.
Ainsi pour ces derniers, avec toutes ses bonnes dispositions des autorités gouvernementales, il y a de quoi à s’interroger sur les réelles motivations de cette grève de 72 h.
Quant aux grévistes qui ont animé une conférence de presse le samedi 12 octobre 2024, ils ont fait savoir que c’est fasse au dialogue de sous que mène leur ministère de tutelle et la non avancée de leur points de revendications depuis des lustres qu’ils tiennent à se faire entendre auprès de qui de droit à travers ces 3 trois jours de débrayage. Aussi ont-ils dénoncé la méthode de négociation proposée par le Ministère d’Etat, ministère de la Fonction publique. Car cette méthode ne les arrange pas. Et donc cette grève sera une occasion pour les autorités de trouver après d’autres méthodes appropriées pour régler efficacement leurs problèmes.
Ils ont par ailleurs mis à nu les méthodes anti-reconnaissance de droit syndical par le directeur des ressources humaines du Ministère de la l’Education nationale et de l’alphabétisation qui a menacé des membres des syndicats de mutation, de suppression de certains avantages etc., si ces derniers participent à cette grève des 15, 16 et 17 octobre prochains. Ils ont même menacé d’aller porter plainte au siège de l’OIT à Genève en Suisse.
Bah Kan Naoulê
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